Mémoires |
BULLETIN DE L'ANNÉE ACADÉMIQUE
1997-1998
établi par Jean NAYROLLES, Henri PRADALIER, Maurice SCELLÈS
Cette édition électronique respecte la mise en page de l'édition imprimée (Bulletin de l'année académique 1997-1998, dans Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. LVIII, 1998) dont nous indiquons la pagination. Certaines illustrations en noir et blanc ont cependant été remplacées par des illustrations en couleur.
1ère partie Séances du 4 novembre 1997 au 17 février 1998 |
2e partie Séances du 3 mars 1998 au 23 juin 1998 |
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 257
SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1997
Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza,
Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes
Blanc-Rouquette, Labrousse, Pradalier, Delaplace, DErcole, Ugaglia, Napoléone,
Pujalte ; MM. labbé Bacrabère, labbé Rocacher, le père Montagne, le
général Delpoux, Burroni, Cabau, Catalo, Gilles, Hermet, Manière, Manuel, Nayrolles,
Péaud-Lenoël, Peyrusse, Roquebert, Salvan-Guillotin.
Excusés : Mmes Aribaud, Cazes, M. Tollon.
Le Président ouvre la séance en formant des vux pour cette
nouvelle année académique ; à toutes et à tous, il souhaite réussite dans la
poursuite des recherches qui font vivre notre Société.
Le Secrétaire-adjoint donne lecture des procès-verbaux des deux
dernières séances du mois de juin. Les deux procès-verbaux sont adoptés.
Le Président donne ensuite quelques informations diverses. Une discussion s'engage à propos de quelques événements survenus pendant l'été. Est ainsi évoqué le remontage absurde et si peu spectaculaire dun petit morceau de rempart antique, Square du Capitole. On s'inquiète également de ce qu'il adviendra de lHôtel Saint-Jean-de-Jérusalem, qui abritera prochainement les services de la D.R.A.C. : quel sera le sort réservé aux découvertes archéologiques éventuelles qui pourraient y être faites ? Seront-elles laissées sur le site ? Mènera-t-on létude monumentale densemble et de détail que lon est en droit dattendre sur pareil édifice ?
Puis le Président donne la parole à M. labbé Baccrabère pour la communication du jour : La céramique du XVe siècle dans l'ancien quartier Saint-Georges à Toulouse, publiée dans ce volume (t. LVIII, 1998) de nos Mémoires.
Lorateur sétant exprimé, le Président le remercie et
appelle les questions suscitées par cet exposé.
Au sujet du puits ayant fait lobjet de la fouille présentée, M.
Catalo demande si son remplissage était homogène ou bien si des couches différentes
permettent détablir une chronologie relative. M. labbé Baccrabère répond
quil était impossible, pour des raisons de sécurité, de tenir compte des couches
successives à lintérieur du puits, profond de 14 mètres. Malgré labsence
de stratigraphie, il a pu faire des rapprochements avec le matériel livré par un autre
puits, rue Achille Viadieu, daté avec certitude du XIVe
siècle. M. labbé Baccrabère reconnaît volontiers le manque de données
scientifiques dû à labsence de véritable stratigraphie et aux conditions
durgence dans lesquelles la fouille a été menée. Il se demande si, le quartier
Saint-Georges ayant été un dépotoir dans lAntiquité, le fond du puits ne
pourrait pas même être daté de cette époque.
M. Louis Peyrusse est étonné par les objets métalliques dont les formes évoquent aussi bien le XVe siècle que le XIXe siècle. M. labbé Baccrabère croit pouvoir affirmer que les rejets dans le puits séchelonnent du XIVe jusquau XVIe ou au début du XVIIe siècle. M. Jean Catalo confirme la datation (XIVe-XVe siècles) des objets présentés, en rapport avec les éléments retrouvés ailleurs à Toulouse. Daprès lui, on peut même remonter jusquà la fin du XIIIe siècle pour certains dentre eux.
La parole est donnée à M. Maurice Scellès qui annonce que les épreuves du prochain volume des Mémoires devraient partir chez limprimeur avant la fin de la semaine : une innovation cette année, la présence de quatre pages en couleur. Le volume comptera moins de pages que celui de lannée dernière à cause de la défection de certains auteurs. Le Secrétaire-adjoint insiste sur le fait que les membres ayant annoncé une publication doivent tenir leur engagement.
Le site Internet de la Société Archéologique du Midi de la France est ouvert depuis quelques jours : il présentera entre autres les tables de nos Mémoires et les comptes rendus des séances. Il revient aux membres de faire vivre ce site. Ils peuvent par
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exemple y présenter leurs publications (linformation et la publicité font parfois bon ménage) ou rédiger des publications « en ligne » (spécifiques au réseau Internet), articles, traductions, etc. Le site est partagé avec lAcadémie des Sciences. On espère quà terme, toutes les sociétés savantes de lHôtel dAssézat y prendront place.
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1997
Présents : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour,
Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Aribaud, Delaplace,
DErcole, Heng, Napoléone, Pujalte ; MM. labbé Baccrabère, le général
Delpoux, Bertrand, Burroni, Cranga, Gilles, Ginesty, Manuel, Nayrolles, Peyrusse,
Pousthomis, labbé Rocacher, Salvan-Guillotin ;
Excusés : Mme Cazes ; MM. Pradalier, Président, Cazes, Secrétaire Général, le père
Montagne, Tollon ;
Invitée : Mlle Pavla Sadílkova.
En labsence de M. Pradalier, retenu par une conférence donnée à lAcadémie des Jeux floraux, M. Ahlsell de Toulza ouvre la séance et dirige les débats.
Après lecture du compte rendu de la séance du 4 novembre par M. Nayrolles, une discussion sengage sur la modération à apporter aux procès-verbaux publiés dans le bulletin de nos Mémoires. Au terme de ce débat, et après deux modifications, le procès-verbal est adopté.
Mme Delaplace annonce quelle fera le point dans une prochaine séance sur les échanges de publication menés avec dautres sociétés savantes, en France ou à létranger. Parmi les conventions récentes, elle signale celle que la Société Archéologique du Midi de la France vient de passer avec le Musée de Saint-Bertrand-de-Comminges. Une liste complète des échanges en cours sera publiée dans le prochain volume des Mémoires. Un appel est lancé aux membres de la Société afin de suggérer dautres contacts susceptibles denrichir les collections de périodiques de notre bibliothèque.
M. Ahlsell de Toulza se félicite de la convention déchange passée avec le Musée de Saint-Bertrand-de-Comminges et rappelle que la Société lui a cédé, avec ses collections, le fond documentaire quelle possédait sur place, à lexception des archives qui, désormais conservées à Toulouse, ont été photocopiées pour le Musée. Mme Delaplace pense que toutes les pièces nont sans doute pu être dupliquées et demande que les archives concernant ce site archéologique de première importance soient accessibles aux chercheurs ayant fouillé récemment les monuments de la cité antique. M. Scellès répond que pour linstant, si le fond documentaire nest pas communicable, cela tient à des raisons matérielles, son rangement restant à faire au sein de la réserve ; il s'agit cependant d'une situation très provisoire.
Après avoir annoncé la présentation du livre Hôtels et demeures de Toulouse et du Midi toulousain, cosigné par MM. Ahlsell de Toulza, Tollon et Peyrusse, à loccasion du Salon du Livre qui se tiendra le samedi 29 novembre 1997 au Moulin du Bazacle, M. le Trésorier donne la parole à Mme Heng pour sa communication, La tenture de lHistoire de David au Château dUrtubie (Pyrénées-Atlantiques), publiée dans ce volume (t. LVIII, 1998) de nos Mémoires.
M. Ahlsell de Toulza remercie Mme Heng et se réjouit de voir le pays basque, grâce à cet exposé, entrer dans le champ détudes de notre Société. Il lance le débat en se questionnant sur le format des tapisseries présentées : certaines nont-elles pas été recoupées ? Pour Mme Heng, cette impression relève de lutilisation que lon fait des cartons au moment du tissage. En effet, ils sont découpés en lés de sorte quon peut parfaitement ne tisser quune partie du carton. Au milieu du XVIe siècle, les grandes tentures comparables à celles du château dEcouen, qui remontent au début du siècle, ne sont plus à la mode. Les dimensions diminuent considérablement et lon préfère désormais des formats qui peuvent sadapter plus facilement aux intérieurs. M. Nayrolles croit percevoir une sorte de continuité plastique entre les différentes pièces de la série de tapisseries du château dUrtubie : la hauteur des horizons, le jeu des regards des personnages, les architectures semblent renforcer lunité de lensemble en établissant des effets de correspondances. Selon Mme Heng, ces effets résultent en grande partie du caractère stéréotypé du travail des liciers qui utilisaient souvent un carton donné pour plusieurs tentures.
M. Bertrand insiste sur la valeur accordée aux tapisseries qui en faisait des objets de présents particulièrement appréciés. Aussi souscrit-il volontiers à la thèse de Mme Heng expliquant la présence de ce très bel ensemble de tentures au château dUrtubie par lintense activité diplomatique que connut la région au moment de la signature du traité des Pyrénées et du mariage de Louis XIV avec lInfante dEspagne.
M. Scellès demande si des documents photographiques témoignent des deux tapisseries vendues dans les années 1930 et qui appartenaient au cycle. Mme Heng na rien retrouvé à leur sujet, mais croit pouvoir affirmer que ces deux tentures représentaient David et Goliath dune part, David et Bethsabée dautre part, deux épisodes essentiels dans le cycle qui, à lorigine, comptait bien neuf tentures, alors que le château dUrtubie nen possède plus que sept.
M. Ahlsell de Toulza donne la parole à M. Pousthomis pour un rapide exposé relatif aux travaux menés à la tour dArlet, bâtiment civil du XIIIe siècle conservé à Caussade
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« De lutilité de larchéologie dans la
restauration dun édifice :
lexemple de la « Tour dArles » à Caussade (Tarn-et-Garonne)
Larchéologue et le Service des Monuments Historiques ont trop longtemps vécu en signorant. « Le bitume était une frontière (...). Traditionnellement, ce qui était conservé au-dessus du sol relevait de l'histoire de l'art, de l'architecture (...) et ce qui était au-dessous de l'archéologie » (1). Le résultat a quelquefois conduit à des erreurs d'interprétation ou à des restaurations effaçant à jamais les traces archéologiques de lévolution du bâti.
Mais lorsque le Service des Monuments Historiques et
larchéologue travaillent ensemble, alors le résultat peut être des plus
remarquables, tant pour la connaissance de lédifice que pour la qualité de la
restauration. Cest le cas dun bâtiment de Caussade : la « tour
dArles » (ou Arlet).
Il faut savoir gré à Mme Tomasin, alors Conservateur Régional des
Monuments Historiques de Midi-Pyrénées, davoir su réaliser cette alliance en
confiant au bureau détudes archéologiques HADÈS létude préalable de ce bâtiment puis le suivi des travaux de
restauration. Il faut également souligner ladhésion totale à cette démarche de
M. Régis Martin, Architecte en Chef des Monuments Historiques en charge de la
restauration. Létude archéologique préalable (2) avait soulevé quelques
incertitudes (dispositions de la partie sommitale de lédifice médiéval, position
de la cheminée, décors peints, espacement de la poutraison des planchers, etc.) que le
suivi du chantier de restauration (commencé en 1997) a permis de lever.
La tour dArles est implantée face au porche
ouest de léglise de Caussade. Elle appartient à une extension de la ville au
milieu du XIIIe siècle, formant
une couronne autour du bourg initial. Deux autres édifices médiévaux remarquables
appartiennent à cette phase dextension : « La Taverne » et la
« Maison de lArbot ».
Avant sa restauration, le bâtiment se présentait sous laspect
dun édifice à deux étages habitables sur cave et entresol. Son état ne pouvait
attirer que lattention des seuls initiés. Ses façades, très perturbées par des
percements du XVIe siècle et
surtout des XVIIIe-XIXe siècles, ainsi quune redivision des
niveaux de planchers, ne pouvaient laisser supposer que lédifice conservait en fait
lessentiel de ses dispositions médiévales et une grande partie de ses décors.
Deux prélèvements de bois, lun au rez-de-chaussée,
lautre sur les vestiges de la charpente originelle ont permis de situer
lédification dans le troisième quart du XIIIe siècle (3).
De plan rectangulaire (4), la construction est
réalisée en briques et n'emploie la pierre que pour quelques bandeaux, deux petits
encadrements de fenêtres et les appuis de baies.
Seules les façades en angle bordant deux rues (place de léglise
à lest, et impasse au sud) étaient destinées à être vues et elles seules
disposent de belles baies géminées. Celle donnant sur la place présente une composition
régulière et symétrique, contrairement à la façade côté impasse. Les vestiges de
motifs non figuratifs, conservés sur deux tympans de fenêtres et sur un bandeau
attestent de décors peints sur ces façades, probablement limités aux baies et bandeaux.
De plus, lenduit au mortier qui souligne les arcs des portes et fenêtres semble
imiter la pierre.
Le mur arrière, à louest, est quasiment aveugle (une
seule baie en meurtrière) car il « confrontait le fossé de la ville » (5). Quant au mur mitoyen nord, les portes
percées sur deux niveaux indiquent danciennes communications avec un bâtiment
nord, aujourdhui remplacé par une maison du XVIIIe ou du début
XIXe
siècle.
Le volume intérieur est initialement divisé en trois niveaux, mis en communication par un escalier droit en bois plaqué contre la paroi ouest. Ces niveaux sont constitués de planchers portant sur dépaisses solives reposant elles-mêmes sur des poutres sablières encastrées dans les murs nord et sud. La cheminée, que lon retrouve à partir du premier niveau habitable, prenait appui contre le mur sud. Contrairement à plusieurs édifices contemporains, elle nest pas marquée par une saillie en façade.
Le rez-de-chaussée est divisé en deux parties. Le
plus grand espace, ouvrant du côté de la place par une porte en tiers point, est occupé
par un local de grande hauteur, faiblement éclairé, qui devait être un entrepôt ou une
vaste remise. En fond, et semble-t-il séparé du volume précédent par une cloison, se
trouve lescalier daccès au logis, desservi par une porte ouverte sur
limpasse.
Le premier étage est éclairé par quatre grandes baies géminées à
coussièges (une seule était conservée intacte, hormis sa colonne et son chapiteau) et
une porte, côté impasse, qui pourrait ouvrir sur un balcon. Les murs portent les
vestiges dun faux-appareil aux joints rouges, également conservé sur les montants
des fenêtres.
Au deuxième étage, on retrouve quatre baies géminées à coussièges, ici complétées par trois petites fenêtres en lancettes sur les faces nord, est et ouest. La limite supérieure de lenduit des murs dessine un haut plafond caréné qui habillait la sous-face de la charpente. Les décors peints s'organisent sur deux registres. La partie inférieure est composée de rectangles à fonds rouges, noir ou blanc dans lesquels sont peints des motifs non figuratifs (cercles, grappes, damiers). Ces décors se poursuivent sur les ébrasements et les piédroits des fenêtres. Une frise de chevrons en rouge et noir, limitée par deux lignes rouges, est partiellement conservée le long des murs ouest et sud. On peut supposer quelle courait sur la périphérie. Elle souligne la base du plafond caréné sur les parois nord et sud et marque une séparation avec un décor supérieur conservé seulement sur le mur ouest. Ce dernier est une vaste composition, contemporaine de la construction ou du tout début du XIVe siècle, représentant une scène de tournoi.
La partie sommitale de lédifice médiéval est presque entièrement conservée et les traces archéologiques permettent une recomposition de la toiture à deux pans, masquée par un mur-écran. La couverture, certainement en tuiles canal, portait sur une
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charpente du type à chevrons-portant-fermes. Lappui de cette charpente, sur les murs nord et sud, était assuré par un système déchelle horizontale formé de deux poutres parallèles, lune noyée au cur de la maçonnerie, lautre saillante sur la face intérieure du mur, toutes deux reliées par des blochets.
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Ici point de chénaux pour lévacuation des eaux pluviales mais des exutoires espacés de 80 à 85 cm le long des murs nord et sud. Sortes dentonnoirs rectangulaires, leur pente assurait un écoulement efficace au travers des murs. La couverture de tuiles devait y pénétrer assez profondément et la modénature en pointe des maçonneries séparant chaque exutoire évitait tout barrage à lécoulement des eaux. Mais ceci nexclut pas la possibilité de compléments détanchéité assurés par des feuilles de plomb, voire des dallettes de pierre. Les débouchés extérieurs, de section carrée, seffectuaient juste au-dessus dun épais bandeau de briques formant goutte deau. |
La conservation exceptionnelle du bâti et des
décors qui laccompagnent font de la tour dArles un des édifices de la
seconde moitié du XIIIe siècle les plus complets entre
Toulousain et Quercy. La quantité et la qualité des informations qui sont ici réunies
dans un même édifice nécessiteraient l'étude de plusieurs maisons de Cahors ou de
Figeac pour obtenir le même résultat.
À linstar de la plupart des riches nobles de la région
(Saint-Antonin, Puylaroque, Caussade, etc.), son bâtisseur, probablement Gausbert de
Lalo, a souhaité affirmer sa puissance financière et son statut social par la
construction dun édifice civil de qualité. Limportance du bâti,
aujourdhui amputé du bâtiment contigu nord (peut-être une « aula »
?) traduit une volonté ostentatoire. Laménagement intérieur avec ses éléments
de confort (coussièges des baies, nombreux placards, niches à lampes) et ses décors
montrent un souci certain de raffinement dans cette demeure.
La première tranche des travaux de restauration sachève. Elle concernait la restitution de létat médiéval des façades principales et des planchers. Gageons que la poursuite du chantier, avec louverture des placards, des portes bouchées et la restauration des décors peints apportera encore de précieuses informations.
Bernard POUSTHOMIS
1. C. ARLAUD et J. BURNOUF,
« L'archéologie du bâti médiéval urbain », dans Nouvelles de l'Archéologie,
n° 53-54 (automne-hiver 1993), p. 5.
2. Bernard POUSTHOMIS, avec la collaboration de Nelly POUSTHOMIS-DALLE,
La tour dArles. Caussade (Tarn-et-Garonne), Rapport détude préalable
à la restauration, Conservation Régionale des Monuments Historiques de Midi-Pyrénées,
1995, 2 volumes.
3. Datations par dendrochronologie effectuées par le laboratoire L.A.E. de Bordeaux.
4. 8 x 11 m.
5. Inventaire des biens de Gausbert de Lalo à sa mort en 1295,
Archives Départementales du Tarn-et-Garonne, 2E 666. »
M. Scellès souligne lintérêt
exceptionnel de ce chantier. Dabord pour la richesse de lédifice quil
met en évidence cest, par exemple, l'une des premières charpentes du
XIIIe siècle restituables dans le Sud-Ouest,
quoique disparue. Ensuite et surtout pour la collaboration exemplaire des divers services
et corps de métier qui y travaillent : le Service des Monuments historiques,
larchitecte en chef des Monuments historiques et lentreprise de travaux
coordonnent leurs efforts avec M. Pousthomis qui mène létude darchéologie
monumentale. Ce dernier confirme que dans de telles conditions, les ouvriers eux-mêmes
développent un regard darchéologue qui aide à lavancement des travaux. Une
publication densemble sera faite au terme de létude, mais bien des questions
demeurent encore sans réponse. Le chantier devrait durer plusieurs mois. La restauration
des peintures murales parachèvera lensemble des travaux.
M. Scellès rappelle que Caussade possède deux autres édifices de la
même époque : la maison de lArbot et lancienne Taverne rue de la
République. Il faudrait pouvoir mener de front létude des trois bâtiments : nos
connaissances sur la maison médiévale auraient sans doute beaucoup à y gagner.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1997
Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; MM. Cabau, Gilles, le Père Montagne, Nayrolles, Peyrusse, membres
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titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Delaplace, Napoléone,
Pousthomis, Pujalte, MM. Pousthomis, Salvan-Guillotin, membres correspondants.
Excusés : le général Delpoux, labbé Rocacher, MM. Gérard, Tollon;
Le Président ouvre la séance en remerciant Christine Delaplace pour le don quelle vient de faire à la Société dun important ouvrage sur Carthage dans les premiers temps du christianisme. Il donne ensuite la parole à Jean Nayrolles pour la lecture du compte rendu de la séance du 18 novembre 1997. Après deux modifications, le procès-verbal est adopté.
La candidature de Mlle Stutz fera lobjet dun rapport de Christine Delaplace et sera soumise au vote dans la première séance de janvier. Le Directeur rend compte du courrier récemment reçu par la Société : invitations, publicités, etc.
Le Président donne ensuite la parole à Anne-Laure Napoléone pour la communication du jour : La ville de Figeac et son habitat (XIIe, XIIIe et XIVe siècles), publiée dans ce volume (t. LVIII, 1998) de nos Mémoires.
Henri Pradalier remercie loratrice et lui pose
une première question : pourquoi utiliser lexpression « maisons
romanes » alors que la chronologie de larchitecture civile diffère
manifestement de celle que fournit larchitecture religieuse ? Anne-Laure Napoléone
convient du caractère conventionnel du terme et reconnaît lutiliser par
commodité. Henri Pradalier apporte quelques précisions sur léglise Saint-Sauveur
de Figeac quil avait étudiée en collaboration avec Anne-Marie Pécheur : ils
pensaient alors que les chapiteaux du collatéral sud remontaient à la deuxième moitié
du XIIe siècle; mais cette
datation doit être retenue comme simple hypothèse. En effet, les sculptures ont pu être
regrattées ou bien les chapiteaux eux-mêmes peuvent avoir été refaits dans le courant
du XVIIe siècle. Cela na
rien dinvraisemblable si lon pense à lensemble des chapiteaux de
Saint-Amans de Rodez, refait, semble-t-il, au milieu du XVIIIe siècle. Pour Anne-Laure Napoléone, la fin du
XIIe siècle demeure une date recevable et tout à fait cohérente par rapport à
lhistoire et à larchéologie de lédifice. Sil sagit de
copies du XVIIe siècle, elles
reflètent fidèlement les formes originelles puisque sous les motifs sculptés du
collatéral sud se retrouvent sur les chapiteaux des maisons les plus anciennes de Figeac.
En outre, un chapiteau récemment découvert lors de travaux effectués place des
Écritures est identique à un exemplaire du collatéral sud de Saint-Sauveur. Il est vrai
cependant que ces chapiteaux ne semblent pas en accord avec les bases des colonnes qui les
portent. Par conséquent, un remontage nest pas à exclure.
Louis Peyrusse se demande jusquà quel point les datations
dédifices civils peuvent être confortées par larchitecture religieuse dès
lors que subsistent de tels doutes. Pour Anne-Laure Napoléone, ces rapprochements
simposent malgré tout, dautant plus que Figeac offre un ensemble cohérent de
formes, qui se retrouvent à Cajarc mais ne sont pas celles des maisons ni des églises de
Cahors.
Louis Peyrusse sétonne des réticences à appeler « cour »
lespace vide à larrière des maisons. Anne-Laure Napoléone pense que ce
terme doit être réservé à des espaces structurés autour desquels sarticulent
plusieurs ailes et, éventuellement, un escalier extérieur. Nelly Pousthomis propose le
terme « patus » pour désigner ces espaces vacants qui ne
relèvent pas directement de larchitecture des maisons. Anne-Laure Napoléone,
répondant à une question dHenri Pradalier, situe lapparition de
lescalier extérieur parmi lensemble figeacois dans la maison des Écritures,
à la fin du XIIIe siècle. Mais
lexemple le plus ancien et le plus célèbre dans la région réside, selon Maurice
Scellès, dans la maison romane de Saint-Antonin datée vers 1150.
À Bernard Pousthomis, désireux de savoir si une étude dendrochronologique a été menée sur les maisons de Figeac, Anne-Laure Napoléone fait une réponse négative qui déçoit mais suscite aussi bien des espoirs. Maurice Scellès attend beaucoup du développement de cette pratique de laboratoire. Des datations fournies par larchitecture civile, où beaucoup de pièces de bois demeurent prises dans les murs, viendront confirmer ou infirmer la chronologie de monuments religieux grâce à lanalyse comparée des formes, en particulier dans le domaine de lornement. Bernard Pousthomis précise la date de la tour dArlet à Caussade donnée par cette technique : entre 1260 et 1270 environ.
À Guy Ahlsell de Toulza demandant à quelle époque
apparut le châssis vitré non dormant, Maurice Scellès affirme que le Quercy ne connut
pas ce système avant le XVIe
siècle, même sil existe en Flandre depuis le XVe siècle. A partir du moment où la fenêtre à croisée apparaît,
lévolution des formes ralentit.
En réponse à une question de Bernard Pousthomis sur
lutilisation de la brique à Figeac, Anne-Laure Napoléone déclare quelle
nest employée pendant longtemps que pour les contrecurs de cheminées.
Maurice Scellès apporte une explication concernant
les dimensions très réduites des pignons des maisons « romanes » à Figeac : elles
sont liées au fort développement que connaît la ville à cette époque. Un tel
morcellement du parcellaire se retrouve dailleurs à Cluny, dont larchitecture
civile a été étudiée par Pierre Garrigou Grandchamp. En revanche, ces petites
parcelles nexistent pas à Cahors, ni à Saint-Antonin.
Au sujet du lien à établir, selon Daniel Cazes, entre la maison
antique et la maison médiévale, Maurice Scellès pense quil faut être prudent. La
continuité entre la ville romaine et la ville médiévale laisse encore sans réponse de
nombreuses questions.
Guy Ahlsell de Toulza attire lattention sur la restauration en cours de la maison dite « romane » de la rue Croix-Baragnon : larc du rez-de-chaussée a été remonté à un niveau sensiblement plus haut que celui dorigine, sans raison apparente. Anne-Laure Napoléone essaiera den savoir plus sur ce curieux remontage.
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SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1997
Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de
Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire-adjoint ;
MM. labbé Baccrabère, Cabau, Gérard, le Père Montagnes, labbé Rocacher,
Roquebert, membres titulaires ; Mmes Delaplace, Napoléone, Pujalte, Ugaglia ; MM. Gillis,
Salvan-Guillotin, membres correspondants.
Excusés : Mmes Pradalier-Schlumberger, Aribaud, dErcole, MM. Cazes, Secrétaire
Général, le général Delpoux, Nayrolles.
Invités : MM. Lucien Remplon et Olivier Testard.
Le Président ouvre la séance à 17 heures. Ayant fait remarquer que lassistance se trouve fortement réduite, Henri Pradalier en indique la raison : la tenue dune conférence que le recteur Joutard prononce au même moment dans lHôtel dAssézat. Le Directeur intervient ensuite pour le compte rendu de la correspondance imprimée.
Puis le Président donne la parole Pierre Gérard pour la communication du jour : Les renseignements archéologiques fournis par le cartulaire de Saint-Sernin.
Le Président remercie lorateur. Après avoir souligné lintérêt que présente pour larchéologie létude du vocabulaire employé dans les textes médiévaux, Henri Pradalier ouvre la discussion en demandant si les tours de la cathédrale Santa Maria de Pampelune, dont le roi de Navarre sempara en 1157 (Cartulaire de Saint-Sernin de Toulouse, édition Douais, n° 632), avaient une fonction militaire. Pierre Gérard répond que lon manque de précisions à ce sujet ; il note que la cathédrale était proche des fortifications de la ville et que ses tours pouvaient éventuellement compléter le système de défense. Maurice Scellès rappelle que les tours ont en général un rôle tout à la fois pratique et symbolique, et Guy Ahlsell de Toulza fait observer que celles des églises servent de clochers et font ainsi partie du dispositif dalarme.
Léchange de vues porte ensuite sur la signification de quelques termes employés dans les textes médiévaux. Il sagit notamment du mot solerium, que Pierre Gérard a rencontré dans un acte du cartulaire de Saint-Sernin daté de 1155 (n° 106) et qui lui semble désigner une terrasse. Pour Maurice Scellès, le terme de « solier » doit correspondre à lidée détage, pour Louis Latour, à celle de comble ouvert, et pour Michel Roquebert à celle de grenier. Ce dernier mentionne une enquête menée en 1306 au sujet des prisons de Carcassonne où il est question dun transfert de détenus sous un solerium. Patrice Cabau cite un document de 1445 relatif aux réparations à faire à la maison du viguier de Toulouse, dans lequel solier désigne un plafond, puis il sinterroge sur le sens du mot vitreale, utilisé dans le même acte du cartulaire (n° 106) et quil lui paraît difficile, pour des raisons de contexte, de traduire ici par « vitrail ».
Le Président présente le nouveau volume des Mémoires de la Société (tome LVII, 1997), publié dès avant la fin de lannée, et signale que cette performance a été en partie obtenue grâce à la discipline des auteurs. Il est rappelé à ce propos que le mois de juin représente pour la remise des manuscrits une limite extrême. Maurice Scellès demande aux intervenants de vouloir bien fournir à lissue de leur communication un texte du type de ceux destinés à la presse afin de le diffuser sur le site Internet de la Société.
Henri Pradalier donne ensuite la parole à Anne-Laure Napoléone et à Olivier Testard, qui présentent à la Société des informations concernant les travaux de « restauration » entrepris lété dernier à la maison gothique, n° 15 rue Croix-Baragnon.
Cet édifice exceptionnel, témoin unique à Toulouse de
larchitecture civile du début du XIVe siècle, présente sur la rue, au premier étage, une suite de cinq baies
géminées par lesquelles la grande salle prenait jour. Cette portion de la façade avait
été classée parmi les Monuments historiques le 7 décembre 1923, alors que la maison
venait dêtre surélevée dun étage. Un arrêté ministériel du 3 mars 1997
vient de placer sous protection lensemble de limmeuble.
Une entreprise procède actuellement à la restitution des deux grands arcs
segmentaires des boutiques du rez-de-chaussée, qui avaient été partiellement détruits
au XVIIe siècle pour
laménagement dun entresol. Or le niveau des nouveaux arcs est supérieur
denviron quatre-vingts centimètres à celui des arcs primitifs, comme on peut le
constater à partir des sommiers et des retombées des voussures dorigine encore en
place.
Afin dexpliquer cette bizarrerie, Olivier
Testard expose les origines et le déroulement du chantier : la maison fut laissée
quelque temps à labandon, puis occupée par des squatters et alors mise en
péril par un début dincendie ; enfin, elle fut acquise par une société de
promotion immobilière avec le projet dy aménager une série dappartements.
Olivier Testard a réalisé pour lArchitecte en Chef des Monuments historiques,
Bernard Voinchet, létude préalable à cette rénovation. Il sagissait pour
lui de concilier les contraintes dadaptation aux normes du confort moderne et les
impératifs de conservation des éléments archéologiques déjà connus ou découverts
lors des opérations préliminaires : menuiseries des fenêtres de la façade sur cour, du
XVIIe siècle ; dans la grande
salle, plancher dorigine, du début du XIVe siècle, constitué de planches énormes posées directement sur la poutraison,
et éléments de décor peint à motifs géométriques, datable de la même époque, mis
au jour en 1991. Le statu quo avait été recommandé, autant que faire se
pourrait. Pour les vestiges de peintures murales, une dépose et la conservation dans un
musée avaient été envisagées, mais cette solution sest heurtée à des
problèmes techniques ; finalement, les vestiges seront laissés en place et dissimulés
derrière les contre-cloisons des nouveaux appartements.
LAdministration avait initialement promis des subventions, mais
il semble que cette aide nait pu être accordée qu'en partie, et le parti de
restauration préconisé par les architectes, devenu trop onéreux, na pas été
retenu par le promoteur. Celui-ci, soucieux de rentabiliser ses investissements, a tenu à
exploiter toutes les surfaces existantes, donc à aménager aussi lentresol,
doù le surhaussement des arcs segmentaires de la façade sur rue.
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TOULOUSE, RUE CROIX-BARAGNON, MAISON MÉDIÉVALE : les arcs segmentaires des boutiques ont été reconstitués au-dessus de leur niveau dorigine. |
Christine Delaplace se demande comment il est possible quun édifice dun tel intérêt archéologique ait pu être lobjet dune opération immobilière. Il est rappelé que lacquisition de cette maison a été proposée à la Ville de Toulouse, mais en vain, car, en matière de patrimoine immobilier, la politique de la municipalité actuelle nest pas à lachat, mais à la vente.
Maurice Scellès juge ce chantier exceptionnel, tant par limportance de lédifice concerné que par la gravité des problèmes quil fait surgir. Il souligne comme essentiel le fait que létude archéologique du bâtiment ait pu être réalisée. Lévolution de cette affaire lui paraît poser de façon cruciale la question de savoir quels sont les moyens dont lAdministration dispose pour dédommager les propriétaires ou entrepreneurs privés qui ont à subir un préjudice du fait des contraintes quelle leur impose au nom de lintérêt général. Maurice Scellès fait ensuite observer que les menuiseries anciennes disparaissent progressivement, ces éléments étant généralement ignorés et sacrifiés lors des travaux de rénovation. Olivier Testard note que leur maintien in situ pose un problème dadaptation aux exigences de confort et quil nexiste par ailleurs aucun dépôt pour les recueillir. On signale à ce propos la perte récente de menuiseries du presbytère de la Daurade, dun type comparable à celles conservées au château de La Réole. Guy Ahlsell de Toulza rappelle le cas des éléments de fenêtres de lHôtel dAssézat qui faillirent disparaître lors de la dernière restauration.
SÉANCE DU 6 JANVIER 1998
Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de
Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Cazes, Secrétaire Général,
Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mme Labrousse, MM. Cabau, Hermet, le Père Montagne,
Nayrolles, Peyrusse, Prin, Vézian, membres titulaires ; Mmes Blanc-Rouquette,
Delaplace, Napoléone, Pousthomis-Dalle, Pujalte, Rousset, MM. Burroni, Manuel,
Pousthomis, membres correspondants.
Excusés : Mmes Aribaud, Pradalier-Schlumberger, MM. le général Delpoux, Tollon.
Le Président ouvre la séance en présentant ses vux aux membres de la Société. Après lecture du procès-verbal de la séance du 2 décembre 1997 par Jean Nayrolles, le Directeur rend compte du courrier reçu par la Société : annonces, publicités, etc.
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Henri Pradalier informe les membres présents de la
soutenance dhabilitation de notre confrère Bruno Tollon, prévue pour le 12 Janvier
à lUniversité du Mirail, puis donne lecture dune lettre de Monsieur dOrgeix sinquiétant du projet de réaménagement du Muséum
dhistoire naturelle de Toulouse annoncé dans un article de La Dépêche du
Midi paru le 28 novembre dernier. Une discussion sengage sur le thème des
réaménagements muséologiques récents et les diverses tendances aujourdhui en
vigueur. Daniel Cazes reconnaît ignorer les détails du projet incriminé mais espère un
renouvellement respectueux des salles du Muséum et de la présentation des collections
considérant le caractère historique de leur constitution au XIXe siècle. Il cite en exemple la nouvelle présentation des uvres de la
villa Borghèse reprenant pour lessentiel la présentation ancienne qui, en soi,
possédait une évidente valeur historique.
Louis Peyrusse réagit à ces propos en affirmant quun musée à
vocation pédagogique, dépendant du Ministère de lÉducation nationale, doit aussi
être en prise directe avec la sensibilité contemporaine. Lintervention de
larchitecte Paul Chémétov au Muséum de la ville de Paris lui paraît illustrer de
manière assez remarquable cette préoccupation.
Pour Henri Pradalier, le seul aspect de la question sur lequel pourrait se prononcer la Société Archéologique du Midi de la France concerne le monument : les locaux méritent-ils une protection ? dans quelle étendue ? Manifestement, nous ne disposons daucun élément de réponse. Aussi faut-il renvoyer Monsieur dOrgeix aux précisions que doit pouvoir lui fournir le Conservateur du Muséum.
La parole est alors donnée à Christine Delaplace, auteur du rapport sur la candidature de Mlle Stutz. Cette dernière est élue membre correspondant.
Au titre des questions diverses, Henri Pradalier
annonce que les travaux susceptibles de recevoir un prix cette année doivent être
signalés avant le 3 février.
Maurice Scellès donne quelques informations sur le site Internet.
Anne-Laure Napoléone et lui-même ont décidé de créer un groupe de travail sur la
maison médiévale qui viendra bientôt enrichir le site. Dautres groupes peuvent se
former sous légide, bien entendu, de la Société qui devra leur donner son aval.
Christine Delaplace dresse ensuite le bilan des
échanges établis avec les sociétés savantes dont la liste est publiée dans le dernier
volume des Mémoires. Hommage est rendu à Maurice Scellès qui, au cours de ces
dernières années, a accompli un travail considérable dans ce domaine. Mais beaucoup
reste à faire, car les acquis ne doivent pas masquer dimportantes lacunes. Dans la
perspective de linformatisation des bibliothèques de Toulouse, notre fonds sera de
plus en plus consulté par les étudiants et les chercheurs, cela nous oblige à veiller
à lenrichissement et à la cohérence de nos collections. Ainsi, les membres
sont-ils invités à faire connaître leurs suggestions déchanges à mettre en
place dans lavenir. Le bilan fait apparaître une situation très contrastée selon
les pays. Si nos contacts sont nombreux en Espagne et au Portugal, satisfaisants au Maroc
et en Tunisie, ils sont en revanche quasiment inexistants avec les pays anglo-saxons et
très insuffisants avec des pays pourtant très proches tels que lAllemagne et
lItalie. Daniel Cazes fait remarquer quen Italie, de nombreuses sociétés
savantes ont renoncé à poursuivre des échanges en raisons du mauvais fonctionnement des
Postes, tandis que dans les pays de langue anglaise, priorité est donnée aux achats
plutôt quaux échanges. Christine Delaplace achève son tour dhorizon par les
échanges entretenus avec les sociétés savantes en France : un état des lieux qui tient
plus au hasard quà une réelle politique de prise de contacts; de grandes capitales
régionales (Clermont-Ferrand, Nantes, etc.) ne figurent pas sur la liste de nos
correspondants. Il faudra dans lavenir essayer de combler ces lacunes.
Le Président remercie Christine Delaplace pour ces précisions et
souligne que le travail accompli en dehors des séances est de plus en plus déterminant
dans la vie de notre Compagnie.
Henri Pradalier rend compte de lentretien quil a eu avec le Directeur Régional des Affaires Culturelles de Midi-Pyrénées. La rencontre sest déroulée dans de très bonnes conditions. Les différents points de divergence ont été évoqués avec franchise. En particulier, le souhait a été formulé au nom de la Société archéologique de se voir attribuer au sein de la COREPHAE une représentation qui lui a toujours été refusée jusquà présent. La décision a été prise de recevoir le Directeur Régional des Affaires Culturelles afin quil puisse exposer la politique de lÉtat devant les membres de la Société.
Le Président donne ensuite la parole à Valérie Rousset pour la communication du jour : La maison Payrol à Bruniquel (Tarn-et-Garonne).
Henri Pradalier remercie loratrice et sollicite les questions et remarques des membres présents. Bernard Pousthomis sétonne de labsence dordonnance extérieure dans la disposition des ouvertures. Selon lui, il semble que lorganisation interne ait primé sur le souci de représentation au-dehors. Valérie Rousset confirme cette impression : les espaces très morcelés de la maison pouvaient difficilement se traduire par une hiérarchisation à lextérieur. Lédifice sest constitué par agglomérations successives à partir dune parcelle très réduite, ce qui rend dailleurs lagencement des espaces complexe. Selon Guy Ahlsell de Toulza, limplantation sur un terrain en fort dénivelé interdisait le déploiement dune façade spectaculaire; en outre, la proximité du château de Bruniquel dont subsiste une tour du XIIe siècle trahit la très grande ancienneté du parcellaire. Cette grosse demeure agglomérée, sans cour, comme une maison-bloc, ne relève pas des typologies habituelles.
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Louis Peyrusse demande quel est lusage actuel de la maison Payrol. Il sagit dune demeure privée, mais dont le propriétaire, Monsieur Dupré, a fait une sorte de petit musée pour sa collection particulière qui comporte plusieurs pièces très intéressantes. Cétait à lorigine une maison de marchands.
Au sujet du curieux passage souterrain, Louis
Peyrusse sétonne de la présence dune trappe débouchant sur la cuisine.
Valérie Rousset réaffirme quil sagit bien selon elle dun collecteur
des eaux usées, mais peut-être était-il doté de canalisations aujourdhui
disparues. Pour Maurice Scellès, la galerie elle-même devait servir de puisard. On
aurait adapté un élément fonctionnel à la topographie et à limplantation de la
maison.
Patrice Cabau sinterroge sur les conduits aménagés dans les
murs : ne pouvaient-ils pas servir à la communication orale dun étage à
lautre ? Valérie Rousset ne le pense pas.
Le Président souligne le soin particulier avec lequel la restauration de la maison Payrol a été menée par le propriétaire, et le souci qui a été le sien de l'accompagner d'une étude complète. Un tel souci de larchéologie chez un particulier est en effet exemplaire et mérite d'être donné comme exemple.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1998
Présents : MM. Pradalier, Président, Ahlsell de Toulza, Trésorier,
Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès,
Secrétaire-adjoint ; Mme Labrousse, MM. le Père Montagne, Nayrolles, Péaud-Lenoël,
Peyrusse, Tollon, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Delaplace,
Napoléone, Pujalte, Stutz, Ugaglia, MM. Cranga, Salvan-Guillotin, membres correspondants.
Excusés : M. Coppolani, Directeur, Mme Pradalier; M. Cabau.
Le Président ouvre la séance en donnant lecture dune nouvelle lettre de Monsieur dOrgeix accusant réception de la réponse qui lui a été faite au sujet de ses inquiétudes concernant le projet de rénovation du Muséum de Toulouse. M. dOrgeix souhaite que la Société Archéologique du Midi de la France se lance dans une campagne de protection.
Henri Pradalier signale également la réception de la lettre de candidature de Françoise Tollon au titre de membre correspondant. Jean Nayrolles se chargera de faire le rapport.
La parole est ensuite
donnée à Guy Ahlsell de Toulza pour la communication du rapport financier de
lannée 1997.
Après avoir donné quitus au Trésorier pour son bilan, Henri Pradalier passe au second
point de lordre du jour : le renouvellement, comme nos statuts lexigent, de
trois membres du Bureau le Président,
le Secrétaire Général et le Bibliothécaire-archiviste. Comme cela avait été annoncé
lors dune précédente séance, Henri Pradalier ne se représente pas et Louis
Peyrusse se porte candidat au poste de président. Louis Peyrusse est élu Président de
la Société, et Daniel Cazes et Louis Latour sont réélus à leurs postes.
Notre nouveau Président exprime tout dabord sa gratitude envers les membres de la Société pour leur témoignage de confiance et toute son affectueuse amitié à Henri Pradalier dont les huit années de présidence ont profondément changé la Société. Louis Peyrusse croit devoir rappeler son domaine de recherche la période contemporaine apparemment éloigné des compétences exigées à la tête dune société archéologique. Du moins, luniversitaire quil est, mettra toute sa liberté de parole au service de notre institution.
Ses premières pensées vont à ses prédécesseurs, en particulier au Professeur Labrousse dont la présidence a coïncidé avec la période la plus difficile quaient eu à traverser les sociétés savantes depuis leur création. Cette évocation des personnalités qui marquèrent lhistoire de la Société amène Louis Peyrusse à souhaiter que le travail de mémoire ne sexerce pas seulement dans les discours nécrologiques des séances publiques et que lon renoue avec la tradition du XIXe siècle des notices sur les membres disparus, absolument nécessaires pour que les savants continuent à exister après leur mort.
Tout en se défendant de vouloir ouvrir une ère nouvelle, Louis Peyrusse trace ensuite les grandes lignes de laction quil entend mener au service de notre Compagnie, en insistant sur quelques axes particuliers. La première direction pourrait être dordre juridique : une réforme des statuts qui ne sont plus appliqués et difficilement applicables aujourdhui semble de plus en plus nécessaire, à condition, bien sûr, de ne pas risquer de perdre la déclaration dutilité publique. Adapter la Société aux conditions actuelles, cest aussi redéfinir les rapports quelle cultive avec le public : en plus de la séance publique annuelle, de caractère académique, on pourrait encourager les travaux collectifs, inviter plus souvent des personnalités extérieures, envisager des séances foraines, lancer des cycles de conférences, toutes choses qui permettraient de mieux nous faire connaître. Dans cette même perspective, Louis Peyrusse souhaite un examen approfondi des rapports que la Société entretient avec les différents acteurs du monde du patrimoine. Naturellement, il ne sagit pas de renier ce qui fait la spécificité de notre institution qui nest pas une association de sauvegarde mais dans ce domaine aussi, il faut prendre en compte les réalités actuelles. Les travaux publiés par la Société pourraient accompagner cette évolution : des volumes thématiques, tels que les Mémoires consacrés naguère à la cathédrale Saint-Étienne, rencontrent dautres publics que nos lecteurs habituels et fédèrent la recherche au lieu de la cloisonner. Louis Peyrusse appelle de ses vux une étude de lHôtel dAssézat dont le principal auteur devrait être Bruno Tollon. Il propose
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aussi lidée dune iconographie historique des monuments de Toulouse et de sa région, pour laquelle le site Internet pourrait savérer dune grande utilité.
Dautres moyens de rayonnement restent à trouver et Louis Peyrusse se déclare ouvert à toutes les suggestions. Dans cette conjoncture favorable, la Société Archéologique du Midi de la France doit jouer pleinement son rôle de pont entre la société civile et la recherche « pointue ». Le président conclut son intervention en exprimant toute sa confiance dans lavenir de notre Compagnie.
Au titre des questions diverses, Maurice Scellès présente limpression sur papier du site Internet tel quil existe aujourdhui et tel quelle en conservera le souvenir.
SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1998
Présents : MM. Peyrusse, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Cazes, Pradalier-Schlumberger, MM. Blaquière, Cabau, le général Delpoux, Gilles, Hermet, Nayrolles, Pradalier, labbé Rocacher, Roquebert, Tollon, membres titulaires ; Mmes Blanc-Rouquette, Delaplace, Napoléone, Pujalte, Stutz, Ugaglia, MM. Burroni, Catalo, Gillis, Ginesty, Salvan-Guillotin, membres correspondants.
Après avoir fait part de la candidature de Mlle Cécile Gloriès, primée lan dernier par la Société, au titre de membre correspondant, Louis Peyrusse donne la parole à Patrice Cabau pour la lecture du procès-verbal de la séance du 16 décembre 1997, et à Jean Nayrolles pour le procès-verbal du 20 janvier 1998. Les deux textes sont adoptés.
Après lecture par Jean Nayrolles du rapport sur la candidature de Françoise Tollon, qui est élue membre correspondant, le Président donne la parole à Jean Catalo pour la communication du jour sur Les fouilles du « donjon » du Capitole, publiée dans ce volume (t. LVIII, 1998) de nos Mémoires.
Louis Peyrusse remercie lorateur et le
félicite pour la clarté de son exposé.
La première question porte sur l'étendue de la fouille. Il paraît en
effet difficile de comprendre pourquoi elle a été limitée aux deux tiers du site,
l'aire située sous l'escalier ne faisant l'objet que d'une simple surveillance
archéologique. Le choix qui a été fait semble, une fois encore, relever de la
demi-mesure. Un tel parti est dautant plus surprenant quen loccurrence
la Ville était laménageur, et donc le financeur de lintervention
archéologique. Or la Municipalité ne semble pas en cause, et étendre
linvestigation à la totalité du site naurait pas entraîné un surcoût
très considérable. C'est que, comme on la trop souvent constaté,
larchéologie de sous-sol est traitée en France comme un luxe, une pratique
superflue.
On souligne cependant que les fragments denduit peint trouvés à
cet endroit ont été recueillis avant le début des travaux daménagement.
Peut-être en est-il resté sur place, mais du moins est-on sûr que les morceaux
récoltés nont pas souffert des déblaiements à la pelle mécanique.
À une question de Daniel Cazes concernant la
technique de ces peintures, Jean Catalo répond quil sagit de détrempe et que
les surfaces étaient recouvertes dun lait de chaux.
Pour Louis Peyrusse et Michèle Pradalier-Schlumberger, si ces
fragments datent effectivement du XVe siècle, ils relèvent semble-t-il dun style assez archaïque, à moins
quils ne remontent au siècle précédent. Mais des éléments de décor arrachés
à des murs et mêlés à de nouveaux enduits ne présentent pas forcément une grande
homogénéité stylistique.
Au sujet de leur emplacement dorigine dans lensemble
monumental du Capitole, Bruno Tollon considère toute hypothèse comme hasardeuse, même
à laide des textes tardifs mentionnant la présence de grands
programmes peints. En revanche, le nombre considérable des fragments recueillis indique
sans aucun doute lampleur des remaniements, que ce soit dans la chapelle ou dans le
Consistoire.
Jean Catalo abonde dans ce sens et confirme quaprès
lincendie de 1444, de très gros travaux ont eu lieu et que lactivité
maximale se situe entre 1480 environ et 1502.
Bruno Tollon sinterrogeant sur la forme des chanfreins retrouvés
au seuil de la porte du XVe
siècle, Jean Catalo précise quils nétaient ni moulés ni taillés, mais
obtenus par la disposition particulière de briques ordinaires.
Au titre des questions diverses, on demande si les membres de la Société peuvent espérer une visite de lHôtel Saint-Jean afin de prendre connaissance des découvertes récentes qui y ont été faites. Le Président craint que la législation sur les chantiers ne soit trop stricte pour permettre la visite dun groupe assez nombreux. Il est indiqué que le projet est en effet prématuré. La presse a pourtant publié des photographies fournies par lAdministration. La télévision même ne sest-elle pas rendue sur place ? Un membre s'étonne de la manière dont la D.R.A.C. a conduit cette affaire. On rappelle dans quelles conditions ont été faites ces découvertes, expliquant quen lespèce, la D.R.A.C. a géré au mieux la situation. Pour Louis Peyrusse comme pour Henri Pradalier, il convient tout de même de ne pas perdre de vue lessentiel, cest-à-dire le travail archéologique qui, jusquà présent, semble mené avec sérieux situation assez rare dans lhistoire récente des fouilles à Toulouse pour être soulignée, et que notre
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Compagnie a peut-être contribué à créer. Les agitations médiatiques passeront au rythme quimpose la société du spectacle, rythme qui nest pas celui de la Société Archéologique du Midi de la France.
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1998
Présents : MM. Peyrusse, Président, Coppolani, Directeur, Latour,
Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire-adjoint ; MM. labbé Baccrabère,
Blaquière, le général Delpoux, Gilles, Péaud-Lenoël, Pradalier, labbé
Rocacher, membres titulaires ; Mmes Delaplace, Napoléone, Pujalte, Tollon, M.
Burroni, membres correspondants.
Excusés : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Cazes, Secrétaire Général, Mme
Aribaud, MM. Nayrolles, Tollon.
Le Président donne la parole au Secrétaire-adjoint
pour la lecture du procès-verbal de la séance du 3 février dernier, rédigé par Jean
Nayrolles empêché dêtre parmi nous ce soir. À la demande du Secrétaire-adjoint,
le procès-verbal sera complété et son adoption est de ce fait reportée à une séance
ultérieure.
Le Président souhaite la bienvenue à Mme Françoise Tollon,
nouvellement élue membre correspondant, et annonce que la Société vient de recevoir la
candidature de M. Olivier Testard, architecte. Maurice Scellès accepte den être le
rapporteur.
Puis le Président donne lecture dun courrier demandant des
renseignements sur lemplacement des chapelles qui se trouvaient sur le site de
lArsenal. M. Coppolani se chargera de la réponse.
Louis Peyrusse signale à lattention de la Compagnie la prochaine
conférence que notre confrère Bruno Tollon consacrera aux demeures méridionales, puis
le Directeur rend compte de la correspondance imprimée.
En raison de l'absence du rapporteur, l'examen de la candidature de Mlle Cécile Gloriès
est renvoyé à une prochaine séance.
Le Président présente alors à la Compagnie Mlle Céline Piot, élue membre correspondant de notre Société lannée dernière mais habituellement retenue à Compiègne. Il la remercie du tiré à part quelle offre à la Société : Alain Beyneix, Céline Piot, « Mobiliers grecs et de tradition grecque dans la vallée de la Garonne et ses abords pendant les Âges du Fer (du VIe au Ier siècle av. J.-C.) », paru dans Aquitania, XII (1995), p. 33-73, et lui cède la parole pour une communication sur Deux vases grecs à figures rouges originaires de Lemnos conservés au Musée Henri IV de Nérac (Lot-et-Garonne) :
« À PROPOS DE DEUX VASES GRECS À FIGURES ROUGES ORIGINAIRES DE
LEMNOS
CONSERVÉS AU MUSEE HENRI IV DE NÉRAC (LOT-ET-GARONNE)
À loccasion de nos travaux sur lAntiquité et lépoque mérovingienne, nous avons été amenée à nous intéresser aux collections archéologiques du musée Henri IV de Nérac afin détudier certains documents relatifs à ces périodes spécifiques. Cest ainsi quau milieu des séries régionales, il nous a été possible didentifier deux vases grecs qui proviennent, daprès létiquette proposée par le musée, dun tombeau de lîle de Lemnos. Surprise par leur présence, nous avons cherché la raison pour laquelle le musée de Nérac conservait ces vases, ce qui nous a poussée, ensuite, à mener des recherches sur la fabrication de céramique à Lemnos.
Avant quYves Marcadal, alors professeur dhistoire-géographie au lycée de Nérac, ne les amenât au musée Henri IV, ces deux éléments avaient été donnés au musée des Beaux-Arts dAgen, certainement en 1947. Ces deux pièces sont de deux types différents, skyphos pour la première, pelike pour la seconde. Si le décor du skyphos est assez courant, celui du pelike est, en revanche, très intéressant, et a motivé cette contribution (1).
LE VASE N° 1 :
Description et iconographie :
Il sagit dune coupe à boire de type skyphos
à figures rouges. Ce vase mesure 10 cm de hauteur ; le diamètre au pied est de 4,5 cm,
celui à louverture de 9,3 cm. Cette forme de skyphos, rencontrée dans le
secteur de Lattes, correspond au type AT-FR-Sk2c et date de 530-400 av. J.-C. (2).
Cest un vase profond à deux anses horizontales sous la lèvre, au profil élancé
et continu, au bord parallèle et au pied annulaire bas divergent.
Le décor, très courant dans le monde grec, est composé dune
tête de femme qui porte des boucles doreilles, un diadème et un collier, tous de
couleur blanche, ainsi quune coiffure relevée en chignon tenu par un crécyphale
blanc. Dautres éléments décoratifs enrichissent la figure : végétaux, palmettes
et petites volutes.
LE VASE N° 2 :
Description :
Il sagit dun pelike de type
AT-FR-Pe3 (3) qui mesure 19,5 cm de hauteur. Le diamètre inférieur est de 9 cm, le
diamètre supérieur de 12 cm. Ce pelike possède des anses assez petites, un col
haut et une ouverture réduite. Sa fonction est de porter, de conditionner. La production
de ce type de vases séchelonne entre 480 et 350 av. J.-C. Daprès sa forme,
ce vase semble dater de la période 400-350 av. J.-C. et peut-être même appartenir à la
phase que lon appelle « style de Kertch » qui montre un regain de
qualité dans la fabrication de la céramique attique à figures rouges après le léger
déclin des années 390-370 av. J.-C.
Le décor est très original et permet de conforter la datation. La
scène est limitée en zone supérieure, cest-à-dire au col, par un décor de
postes. Les figures rouges principales peintes montrent deux athlètes nus qui portent
leur tunique, enroulée autour du
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 268
bras droit. On sent une unité de geste dans la scène : le premier personnage, entouré de volutes doù séchappent des palmettes stylisées, semble appeler lautre athlète qui tourne la tête pour le regarder. Ce second personnage, lui aussi entouré de volutes, porte à son côté gauche un thyrse surmonté dune pomme de pin ici stylisée. À côté du premier athlète, se trouve un linge, terminé par deux petites lanières, accroché au mur par un clou.
Liconographie :
Bien quil y ait une unité de geste dans la scène, liconographie est incohérente. Le premier athlète semble sortir dune scène de palestre ou de gymnase. Le second, en revanche, paraît être dinspiration dionysiaque, le thyrse appartenant à limagerie de Dionysos.
Le style :
Le style est assez maladroit. En effet,
lanatomie nest pas respectée : le nombril est beaucoup trop haut, tout comme
labdomen, les muscles des cuisses et ceux des mollets. Lattache des membres
est stylisée par un simple trait. Les contorsions du corps sont, quant à elles,
relativement irréelles.
En revanche, le peintre a porté son effort sur les étoffes qui
donnent du volume et du mouvement à la scène.
INTERPRÉTATIONS :
La présence de vaisselle athénienne dans lîle de Lemnos, située au nord-est de la mer Egée, nest pas surprenante en soi lorsquon connaît la très large diffusion de cette céramique dans le bassin méditerranéen (4). Lexportation est massive aux Ve-IVe siècles entre les contrées de la mer Noire et lextrême-Occident méditerranéen. Mais le cas de Lemnos peut paraître un temps soit peu particulier, compte tenu des liens étroits qui se sont tissés entre cette île et la thalassocratie du Pirée.
Sans entrer dans un long développement sur les relations entre Athènes et Lemnos, ce qui nest pas le propre de cette contribution, quelques rapides rappels apparaissent cependant souhaitables. Dès le début du Ve siècle, à lépoque de la Confédération de Délos, Athènes se lance dans une politique économique dont le fer de lance demeure sa suprématie navale en Egée. Lors de linstallation des clérouques à Skyros en 476-475, Athènes tient déjà Lemnos, une de ses bases sur la route des détroits, en vue du contrôle de laxe de circulation des blés de la mer Noire (5). Par ailleurs, une preuve de la mainmise efficace dAthènes sur Lemnos sil était nécessaire de la démontrer est apportée par un épisode de la résolution de la guerre contre Samos datant de 441-440 : cest vers lîle de Lemnos que les otages samiens ont été envoyés « en résidence » par les Athéniens (6). Enfin, plus tard, en 386, lors de la conclusion de la Paix du Roi, Imbros, Lemnos et Skyros trois clérouquies athéniennes sont revenues à la grande cité attique. Cette clause, excellente illustration des rapports étroits entre les deux cités, a alors été qualifiée de satisfaction damour-propre (7).
MUSÉE DE NÉRAC, vase n° 1 : |
CONCLUSION : La présence de vases attiques à Lemnos, à première vue originale, est donc mieux comprise à la lecture de lhistoire commune dAthènes et de Lemnos, dautant que les Ve et IVe siècles correspondent avec la chronologie des deux vases conservés à Nérac. La fourchette de datation est vaste : elle va de 530 à 350 av. J.-C., mais la date de production se situe très certainement aux alentours de 400. Le style des deux pièces grecques, presque identique, semble même indiquer quelles proviennent dun seul atelier : ainsi, limportance du blanc, la présence de volutes et de palmettes. Il faut voir maintenant si le style est celui dun atelier de Lemnos ou dun centre de fabrication attique, la présence du vase dans lîle égéenne se comprenant au regard de la diffusion de cette céramique. En effet, la seule mention qui « atteste » lorigine de lîle de Lemnos est létiquette du musée. De qui émane-t-elle ? Est-elle fiable ?
|
Cependant, et cela a été lintérêt de cet article, le décor du pelike est antagoniste en lui-même : les deux personnages donnent limpression dappartenir à la même scène, dêtre liés entre eux, mais les symboles qui se rattachent à eux sont contradictoires. Ce type diconographie est très peu courant dans le monde grec : sagit-il réellement de productions grecques
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MUSÉE DE NÉRAC, vase n° 2 : pelike. |
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 270
ou a-t-on affaire à des faux ? Dautre part, nous navons pas réussi à comprendre pourquoi ces vases étaient arrivés en Lot-et-Garonne, mais, dans lhypothèse où ces pièces ont bien été fabriquées en Grèce, liconographie des productions attiques sest enrichie de deux nouveaux exemplaires.
Céline PIOT
1. Il nous est agréable de remercier M. Des Courtils, maître
de conférences en histoire de lart antique à lUniversité Michel de
Montaigne-Bordeaux III, pour son aide dans létude stylistique ainsi que Richard
Boyer pour ses recherches bibliographiques.
2. M. Py (dir.), DICOCER : Dictionnaire des Céramiques antiques (VIIe
s. av. n. è. - VIIe s. de n. è.) en
Méditerranée nord-occidentale (Provence, Languedoc, Ampurdan) (Lattara, 6),
Lattes, 1993, p. 115.
3. Ibid., p. 114.
4. Pour lExtrême-Occident, voir :
- Péninsule ibérique : P. Rouillard, Les Grecs et la Péninsule ibérique du VIIIe
au IVe siècle av. J.-C. (Publ. Centre
Pierre-Paris, 21), Université de Bordeaux III, 1991.
- Sud-Ouest de la Gaule : A. Beyneix, C. Piot, « Mobiliers grecs ou de
tradition grecque dans la vallée de la Garonne et ses abords pendant les âges du Fer (du
VIe au Ier
siècle av. J.-C.) », dans Aquitania, 13, 1995, p. 33-73.
5. L. Grenet, Lapprovisionnement dAthènes en blé aux Ve
et IVe siècles, Paris, 1909.
6. E. Will, Le monde grec et lOrient, t. 1 : Le Ve
siècle, Paris, 1991, p. 283.
7. E. Will, C. Mossé, P. Goukowsky, Le monde grec et lOrient, t. 2 : Le IVe
siècle, Paris, 1990, p. 30. »
Le Président remercie Céline Piot pour cette
communication dont le sujet nous change quelque peu des thèmes habituellement traités
dans cette enceinte, et demande quel est aujourdhui le statut juridique des deux
vases. Céline Piot précise quil sagit dun dépôt au Musée de Nérac
réalisé par le Musée dAgen auquel les deux objets appartiennent toujours. Le
Président remarque encore que ces deux vases appartiendraient donc à la production
dun même atelier du monde attique, et demande sil existe dans le corpus des
pièces comparables. Maurice Scellès voudrait savoir si les formes des vases et
létude stylistique des décors confirment lorigine donnée par
létiquette, selon laquelle les deux pièces proviendraient dun tombeau de
Lemnos. Céline Piot répond que létude permet seulement de les attribuer au groupe
des vases attiques à figures rouges, sans plus de précision.
Maurice Scellès demande si les deux vases ne peuvent être des faux et
Henri Pradalier voudrait savoir si une telle maladresse de dessin se rencontre à Athènes
même. Céline Piot dit ne pas savoir si le corpus comporte des pièces de qualité aussi
moyenne, mais précise que lauthenticité de ces deux vases na pas été
suspectée par les spécialistes qui les ont vus.
Lordre du jour appelle alors les questions diverses.
Accompagnant son propos de quelques vues du site de
la villa romaine de Chiragan à Martres-Tolosane, le
Secrétaire-adjoint fait un bref rappel de la situation des vestiges, des événements
récents et de létat des négociations en cours. Il indique que grâce aux contacts
pris par M. Jean-Emmanuel Guilbaut, une expérience détude géophysique sera
réalisée sur le site jeudi prochain. Daniel Cazes et lui-même représenteront la
Société. Les premiers résultats pourront en être communiqués à la Société dès la
prochaine séance. Le Président se félicite de cette collaboration nouvelle avec le
Service Régional de lArchéologie.
Claude Péaud-Lenoël et labbé Baccrabère font état des
visites quils ont faites sur le site au cours des années passées et confirment la
présence de tesselles et de nombreux fragments de marbre.
Puis le Président rend compte des dernières réunions de lUnion des Académies et Sociétés savantes de lHôtel dAssézat et de Clémence Isaure, et des Amis de lHôtel dAssézat.
LUnion prévoit lédition dun
ouvrage qui sintitulera Autour dAssézat.
Les travaux de restaurations des décors des salles du rez-de-chaussée
et des salons du premier étage de lHôtel dAssézat, réalisés sous la
responsabilité de larchitecte en chef Bernard Voinchet, seront engagés
prochainement.
La Conférence nationale des Académies, qui réunit autour de
lInstitut de France les 28 académies provinciales antérieures à la Révolution,
se tiendra à Toulouse les 14, 15 et 16 octobre 1999. Les journées toulousaines se
dérouleront autour du thème Du pastel à lespace.
La réunion du Bureau de lAssociation des Amis
de lHôtel dAssézat était présidée par M. Raybaud.
Comme lan dernier, une fête autour dun concert sera
donnée à lHôtel dAssézat le 25 mars à 20 h 30.
Lassociation constate encore que trop de conférences ont lieu le
mardi, et quil faudrait sans doute mieux organiser le calendrier. Les discussions
ont ensuite porté sur différents projets que pourrait développer l'Association.
2e partie
Séances du 3 mars 1998 au 23 juin 1998