Société Archéologique  du Midi de la France
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SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 2020

Séance privée
separateur

Communication longue de Catherine Viers : « La fouille sur le site du Castet Bielh à Saint-Lézer (Hautes-Pyrénées) ».

L’origine du nom Bigorre dérive de Bigerri, nom ethnique par lequel Pline l’Ancien désigne une tribu d’Aquitains habitant au pied des Pyrénées puis nommée par César les Bigerionnes. Le chef-lieu des Bigerri n’est pas connu à cette époque. La liste des chefs-lieux de la notice des Gaules de la fin du IVe siècle, début du Ve siècle, mentionne en revanche Tarbes et ce qu’on identifie comme la forteresse de Saint-Lézer comme suit : « Civitas Turba ubi Castrum Bigorra ». L’ouvrage défensif, installé sur les vestiges d’un oppidum, s’insère dans l’ensemble des enceintes urbaines romaines d’Aquitaine. Des pans entiers de la muraille basculés ou couchés, parfois déplacés par glissement, permettent cependant d’en restituer le tracé. Elle enclos une superficie de 6,2 ha. C’est encore au castrum Bigorra que l’on associe la frappe de deux tiers de sous d’or d’époque mérovingienne frappés à Begorra par un monétaire du nom de Taurecus.

La question, toujours en suspens, est la localisation du siège épiscopal primitif qui se dispute entre Tarbes et Saint-Lézer et l’éventuel déplacement du chef-lieu. Le sujet est débattu par de nombreux auteurs et concerne tant la première localisation de l’évêché que son possible déplacement de Tarbes à Saint-Lézer. L’évêché serait restauré à Tarbes entre la fin du XIe siècle et la fin du XIIe siècle.

Localisée dans le quart sud-est de l’enceinte du Bas Empire, cette opération n’apporte pas de nouvelles données concernant la protohistoire. Quelques trous de poteaux permettent d’envisager la présence de bâtiments au deuxième âge du Fer, sans autre précision.

Il est probable qu’une nécropole ait précédé l’édification de l’enceinte, à en juger par les découvertes de statuaire (têtes et fragments) et de fragments d’épigraphie funéraires découverts sur le site. La mention d’ossements découverts lors un glissement de terrain par Rosapelly et pourrait être l’indice d’une aire funéraire dans cet environnement, situé à proximité d’un bâtiment adossé à la muraille, effondrée. Sur l’emprise de la fouille, hormis quelques fragments de placages de marbres, de moulures très érodées et la présence de fragments de tegulae et de béton de tuileau, la période antique n’est pas représentée.

À l’époque mérovingienne, une batterie de fours à pierres chauffantes illustre les franges d’une occupation et probablement l’usage de la torréfaction. Un four de même nature et apparemment de la même époque semble indiquer que l’ensemble du castrum est fréquenté. Ces structures ne permettent pas de préciser la nature de l’occupation au haut Moyen Âge. Il paraît vraisemblable cependant que des structures de stockage - silo ou greniers - doivent être associés aux fours, situés probablement hors de l’emprise.

Le principal apport de cette fouille est la mise en évidence d’un complexe architectural sur cour correspondant certainement au siège de l’évêché. Celui-ci doit être contemporain d’une enceinte réduite à 1 ha limitée par une levée de terre et des fossés dans le quart sud-est de la muraille antique, le Castel Bieilh. Seules les fondations des murs nous sont parvenues, en galets liés avec un mortier gris clair. Plusieurs phases de constructions témoignent de la pérennité de l’installation, de son extension et de son entretien pendant la durée de son occupation. La récupération systématique des matériaux de construction au moment de la désertion de l’évêché ne donne aucune information sur ses élévations. Le centre du complexe nous échappe, situé hors de l’emprise, probablement à l’ouest de la fouille. L’existence d’une chapelle Saint-Marie, évoquée à propos d’Orre (Bigorre) lors d’un Concile tenu sur place en 1075 ou 1078, se rapporte de ce fait à l’évêché, localisé au castrum Bigorra. La relecture des données historiques et du contexte archéologique tant à Tarbes qu’à Saint-Lézer permet de penser que Saint-Lézer était chef lieu, résidence de l’évêque depuis sa création et jusqu’à son transfert à Tarbes au tournant du xiie siècle.

À la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle, des bâtiments s’installent sur les ruines de l’ancien évêché. L’absence de niveaux d’abandon ou de démolition suppose une récupération systématique des matériaux de construction des bâtiments épiscopaux. Les nouveaux bâtiments sont de facture modeste : solins utilisant des matériaux en remploi (galets du complexe, moellons du rempart) ou trous de poteaux. Les deux techniques utilisent des élévations en pan de bois. De vastes fosses d’extraction de molasse illustrent apparemment les premières activités. Cette molasse est retrouvée comme liant des solins, comme remblai soit en niveau de sol, soit en effondrement de parois en torchis. L’absence de témoins de la vie domestique, foyers, fosses dépotoirs, objets du quotidien et de la sphère personnelle suggère que ces bâtiments sont en périphérie de l’habitat, probablement à usage artisanal ou agro-pastoral.


Légende du plan
Plan du Castrum Bigorra. © N. Rosapelly et X. de Cardaillac, 1890.
I_ Tuco - Ruines romaines et du moyen âge
II_ Maison barrant le chemin disparu de Castetbieilh
III_ Murs de construction romaine
IV_ Murs de construction romaine à revêtement de petit appareil
V_ Croix
VI_ Fontaine
VII_ Murs de construction romaine à revêtement de petit appareil
VIII_ Fondements de murs et substructions
IX_ Maison Roch
X_ Maison Dantin
XI_ Pile romaine à revêtement de petit appareil
XII_ Fontaine de la promenade des Marronniers
XIII_ Église et clocher modernes et ruines de l’ancien clocher
XIV_ Cimetière où était bâtie au siècle dernier l’église paroissiale
XV_ Maison Lacaze
en rouge_ Vestiges de constructions anciennes
trait double_ Chemins actuels
pointillé_ Chemins disparus (plan cadastral)

 

 


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